Jeannot et Margot ou Hansel et Gretel (texte en entier)
Collection Folio Classique (Gallimard 1973 et 1976)
A l’orée d’un grand bois habitait un pauvre bûcheron avec sa femme et ses deux enfants : le petit garçon se nommait Jeannot, la petite fille Margot. Ils avaient peu de choses à se mettre sous la dent, et une fois qu’une grande disette s’était abattue sur le pays il ne put pas même se procurer le pain quotidien. Un soir qu’il se tracassait et que les soucis le faisaient se retourner dans son lit, il soupira et dit à sa femme : « Qu’allons-nous devenir ? Comment pourrons-nous nourrir nos pauvres enfants, alors que nous n’avons plus rien pour nous-mêmes ? » « J’ai une idée, homme », répondit la femme, « demain, de bon matin nous conduirons les enfants dans le bois, au plus épais des fourrés. Là nous leur ferons du feu, nous donnerons encore un petit bout de pain à chacun, puis nous irons à l’ouvrage et nous les laisserons seuls. Ils ne retrouveront pas le chemin de la maison et nous en serons débarrassés. » « Non, femme », dit le mari « je ne ferai pas cela, comment aurais-je le cœur d’abandonner mes enfants dans la forêt, les bêtes sauvages viendraient bientôt les déchirer. » « Sot que tu es », dit-elle, « alors nous mourrons de faim tous les quatre, tu n’as plus qu’à raboter les planches de nos cercueils », et elle ne lui laissa ni trêve ni repos qu’il n’ait consenti. « Tout de même, ces pauvres enfants me font pitié », dit l’homme.